Les attentes des enfants d’immigrés

Libération du 3 mai cite une étude réalisée pour le Haut Conseil à l’évaluation de l’école sur les représentations scolaires des enfants d’immigrés. "Encouragés par des parents qui n’ont quasiment pas connu l’école dans leur pays d’origine, les enfants d’immigrés nourrissent de grands rêves pour leur scolarité. Comparés à ceux des enfants nés de deux parents français, leurs souhaits de formation sont nettement plus ambitieux : tous veulent faire des études supérieures. Mais en appartenant dans le même temps aux milieux sociaux les plus défavorisés, ils sont davantage vulnérables à l’échec scolaire. Un décalage qui nourrit un sentiment d’injustice ainsi qu’une désillusion plus grande à l’égard de l’école".

ARTICLE DE LIBERATION

Encouragés par des parents qui n’ont quasiment pas connu l’école dans leur pays d’origine, les enfants d’immigrés nourrissent de grands rêves pour leur scolarité. Comparés à ceux des enfants nés de deux parents français, leurs souhaits de formation sont nettement plus ambitieux : tous veulent faire des études supérieures. Mais en appartenant dans le même temps aux milieux sociaux les plus défavorisés, ils sont davantage vulnérables à l’échec scolaire. Un décalage qui nourrit un sentiment d’injustice ainsi qu’une désillusion plus grande à l’égard de l’école.

Ce constat, le statisticien Jean-Paul Caille, responsable des panels d’élèves pour le département évaluations et prospectives (DEP) au ministère de l’Education, l’a mesuré au cours d’une étude entamée en 1995. Le DEP a suivi le parcours de 17 830 élèves depuis leur entrée en sixième. L’idée : recueillir leurs jugements sur leur parcours scolaire et comprendre leurs projets d’avenir. Ainsi, même si les situations sont très contrastées, sept ans après leur entrée au collège, seul un peu plus d’un enfant d’immigré sur quatre prépare un bac général (27 %, contre 40 % pour des enfants nés de deux parents français et 48 % pour les enfants nés de familles mixtes). Ils sont en revanche surreprésentés dans les filières technologiques et professionnelles. Et cette orientation à l’écart des sections générales ­ le plus souvent mal vécue ­ se reflète dans l’amertume de leur récit : le conseil de classe s’apparente à leurs yeux à un « tribunal » ou à une « gare de triage » (lire ci-contre).

BTS ou DUT. Autre particularité, la plupart rejettent l’apprentissage, à l’exception des élèves d’origine portugaise. Pour les trois quarts du panel, l’adulte de référence dans la famille est ouvrier, employé de services ou inactif, contre à peine plus d’un tiers pour les enfants nés de deux parents français. En conséquence, ils pâtissent d’un « déficit d’aide parentale », note Jean-Paul Caille. Relégués en filières professionnelles, les trois quarts d’entre eux souhaitent malgré tout poursuivre des études supérieures, contre 65 % des enfants de familles mixtes et 62 % des jeunes de familles non immigrées. Le chercheur évoque un « surcroît d’ambition » : « Après l’origine sociale des élèves, à caractéristiques sociodémographiques comparables, avoir des parents immigrés constitue le moteur le plus puissant de poursuite des études », explique-t-il. Mais quand ils envisagent des études supérieures, six enfants d’immigrés sur dix pensent BTS ou DUT, laissant de côté les cursus plus longs ou des filières plus prestigieuses comme les classes préparatoires aux grandes écoles. Seuls les élèves d’origine asiatique n’écartent pas cette possibilité. Leur réussite scolaire est d’ailleurs assez proche de celle des jeunes de familles non immigrées, avec une forte scolarisation en lycée général et un faible taux de sortie du système scolaire. Le statisticien risque une explication, soulignant que les élèves originaires d’Asie ou d’Europe fréquentent des établissements « moins ségrégués » que les élèves d’origine maghrébine, africaine ou turque.

Rejet. Enfin, les enfants d’immigrés se projettent plus facilement dans les secteurs commerciaux et administratifs que les autres. A l’inverse, les métiers de l’agriculture, de l’hôtellerie, la restauration, l’alimentation et les services aux particuliers ne les attirent pas. Le chercheur y voit l’impératif de bien gagner sa vie mais aussi « un fort rejet de la condition ouvrière », lot de leurs parents. Ce rejet de la profession des parents vaut autant pour les garçons que pour les filles. A l’évidence, la volonté de changer de condition sociale représente un « levier puissant » pour ces jeunes.

mis en ligne le samedi 7 mai 2005
par ML



  
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