Il y a toutes sortes d’absentéismes scolaires

Certes, l’époque privilégie les simplifications abusives et les réponses fortes d’allure autoritaire. Certes, les gouvernants entretiennent volontiers cette tendance ces derniers temps. Mais trop, c’est trop !

La question de l’absentéisme scolaire, telle qu’elle nous est présentée actuellement, illustre parfaitement cette haine de la complexité humaine : un sujet vous inquiète, nous avons la réponse ! L’élève s’absente, c’est donc un futur délinquant : ses parents seront sanctionnés financièrement pour défaut d’éducation. Que c’est simple !

Pourtant, ne nous méprenons pas : c’est le désarroi qui domine chez les parents d’aujourd’hui plus que la démission. D’ailleurs, la loi prévoit déjà les mesures à appliquer aux rares parents défaillants sur un plan éducatif.

Quant à l’absentéisme scolaire, y en a-t-il plus qu’avant ? Pour autant qu’on le sache, oui, à hauteur de 5% en moyenne, avec un taux plus important en lycées généraux et surtout professionnels (jusqu’à 10%), ainsi qu’un rajeunissement des élèves concernés, bien que l’école buissonnière ait toujours existé. Mais plus l’âge où l’on est scolarisé augmente, plus l’absentéisme a de l’espace pour se déployer.

N’oublions pas que l’absence reste la meilleure manière de vérifier l’importance de sa présence dans un univers où la valeur de chacun n’est pas toujours reconnue au-delà de ses performances visibles et de ses apparences comportementales, et à un âge où l’on se questionne sur son identité et l’affirmation de sa singularité.

Elle questionne aussi notre rapport aux études, nos modes d’enseignement, la place faite aux parents dans le dispositif scolaire, autant que les représentations contradictoires que nous véhiculons au sujet du travail.

L’absentéisme est un clignotant qui mérite mieux que ce qui en est fait aujourd’hui. Il est toujours à prendre en compte, mais recouvre de multiples situations qui appellent des réponses très variées. Comment est-il possible de penser qu’il n’y aurait qu’une cause, les parents, et donc un remède unique : les sanctionner ?

Sans craindre un catalogue à la Jacques Prévert, illustrons cette assertion par quelques-unes des situations que la pratique quotidienne nous fait rencontrer :

-  Les adolescents qui testent les limites du collège.

-  Les lycéens qui pratiquent zapping et consumérisme scolaire.

-  Les élèves présents physiquement en cours, mais pas dans leurs pensées.

-  Ceux qui ont des problèmes d’acné et une image négative d’eux-mêmes.

-  Les victimes de racket, de violences et de moqueries.

-  Ceux qui ont besoin de gagner de l’argent en travaillant, parallèlement aux études.

-  Sans parler des problèmes d’orientation et du désinvestissement scolaire qui en découle.

-  Ou encore des peurs d’apprendre à un âge où la menace de débordement par des pensées nouvelles peut conduire à mettre le couvercle sur l’ensemble de ses productions intellectuelles.

-  Sans oublier ceux qui voudraient absolument y aller mais en sont empêchés : les rares « phobies scolaires ».

Au vu de la diversité des situations que recouvre l’absentéisme scolaire, il est évident que sanctionner les parents d’une jeune victime de racket ou de phobies scolaires, renvoyer un élève porteur d’acné sont autant de mesures dont l’aberration est flagrante et contre-productive, alors qu’il serait si simple de permettre au premier de parler de ce qu’il subit avant d’aller porter plainte, au second d’être orienté vers une aide thérapeutique adaptée et au troisième de consulter un dermatologue !

Si l’objectif poursuivi est bien de permettre un retour dans les études de ceux qui en sont éloignés temporairement ou durablement, rien ne pourra se faire d’utile sans prendre en compte ce que peuvent en dire l’adolescent et ses parents, ses enseignants, son CPE, son infirmière et son assistante sociale scolaire, et tous ceux qu’il rencontre dans une pratique sportive, culturelle ou autre. Il importe avant tout de « perdre » du temps à bien évaluer de quoi il retourne derrière les apparences de l’absence, afin d’en gagner en ajustant au mieux les réponses utiles à chacun et à chaque famille.

mis en ligne le mercredi 14 avril 2010
par ML



  
BRÈVES

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