En juin, les écoles festoient et les parents trinquent

En juin, les écoles festoient et les parents trinquent

lundi 25 juin 2007

Mais si, tous les ans ça recommence, à peu près aussi marrant que Noël. Juin bat son plein et avec lui, au plus fort de la fatigue parentale, le festival des fêtes de l’école, de la crèche, le pestacle de chorégraphie improbable apparemment basée sur du free-jazz, celui de la pièce de théâtre (Maeterlink revisité par la maîtresse, souvent). L’enfer pour trouver un foutu déguisement de dalmatien ou de cow-boy auvergnat, ou un accoutrement jaune parce que, cette année, la maîtresse a dit que, pour la classe de CE1, « c’est tout le monde en jaune ».

Une fois passé le cauchemar de l’accoutrement, il y a les gâteaux à faire à J - 1, les sodas à acheter, l’hystérie des petits à juguler, « mamaaaaaaaaaan elles sont où mes tongs jauuuuuuunes ? », etc. Une fois sur place, c’est struggle for life . Du vécu paternel : « Tenir le stand de boissons pendant que les autres parents font semblant de ne pas voir que vous vous débattez avec 200 enfants surexcités qui piaillent tous qu’ils veulent du Coca, en renversant les bouteilles de sirop sur les chips qu’ils enfournent à pleines mains dans leur bouche grande ouverte, etc., etc. »

Sans compter les ateliers maquillage, le fichu stand du chamboule-tout, les bastons pour la dernière part de quiche molle, mais faite maison par la « mamandeléa », l’humiliation de voir sa tarte à la rhubarbe absolument intacte sous les cadavres de chips et de gobelets en plastique, l’intéressante discussion avec le « papadetom » ultra-impliqué dans les affaires de l’école, (la douloureuse question des ateliers du jeudi soir, la maîtresse de CM1 qui paraît-il, n’est pas au niveau et le reste à l’avenant). Le tout sans une goutte d’antidépresseur en bouteille. Farandole de témoignages.

Laurence, 45 ans, une fille de 14 ans :

« Ah ! les mois de juin. Alors que toute l’année, on ne s’est pas senti associés à la vie de la classe, tout à coup les maîtresses se mettent à vous demander des tas de trucs. En CM2, celle de ma fille avait décidé de faire une fête orange. Les parents devaient être habillés en orange et apporter des plats oranges. Au moins, on avait échappé au bleu. L’un de mes pires souvenirs de fin d’année reste le spectacle de danse de ma fille, qui devait avoir 4-5 ans. La pauvre, elle était ridicule dans son justaucorps à volants, pas du tout faite pour la danse classique. Elle m’a aussi fait un sacré coup, le jour où, à la fête de l’école, elle s’est mise à balancer les chamallows dans le stand des chamboule-tout. »

Sophie, deux enfants de 13 et 7 ans :

« Nous, au mois de juin, quand on est bien crevés et que les maîtresses demandent d’apporter, au choix, des plats préparés, des gâteaux ou des boissons, je coche boissons. Pas le temps. Pas envie. Et puis, il y a les spectacles. En maternelle, mon fils Jules, qui avait répété toute l’année des chansons, est resté complètement muet le jour J. Il y avait toutes les classes dans la cour, et lui, c’était le seul à ne pas ouvrir la bouche et à avoir l’air d’être complètement ailleurs. Son père se marrait, pas moi. »

Marc, 38 ans, deux filles de 9 et 6 ans :

« La fête de l’école, c’est l’occasion rêvée de reconstituer le couple papa-maman qui vient de se séparer. Quand je débarque dans la cour pour assister, forcément ému, à l’interprétation chantée de « la Fourmi de 18 mètres avec un chapeau sur la tête », un groupe de proches s’est déjà formé autour de mon ex, me désignant comme le vilain mari. Dans mon coin, j’essaye pourtant de me faire remarquer de ma fille pour qu’elle voie que, si je ne suis plus à la maison, je suis bien là pour elle. Pas un regard. Fin du spectacle. Ma fille, que je n’avais pas vue depuis une semaine court soudain vers moi. Je suis le premier à la féliciter. Une victoire dérisoire, oui, mais un plaisir qui vaut toutes les gênes du monde. »

Marie, 41 ans, deux enfants de 8 et 4 ans :

« Je crois que pour moi, le pire cauchemar n’est pas tellement avant la fête, mais pendant : je ne connais aucun des autres parents, je ne fais partie d’aucune association de parents d’élèves, je n’attends pas mes enfants devant l’école avec les autres vu que je paye quelqu’un pour ça, je ne prends pas un café le matin avec les autres mamans ou papas. Pour tout dire, je les fuis même, nos relations se limitant aux anniversaires, bonjour-bonsoir sur le palier. Du coup, je rase les murs, totalement esseulée, dans la cour, sans même pouvoir fumer une clope pour me donner une contenance. Pendant que mes enfants s’amusent avec leurs copains, je me dandine sur un pied en buvant un jus de raisin, et à midi moins le quart, enfin, je me considère comme libérable. »

Nathalie, 44 ans, deux filles de 14 et 12 ans :

« Cette année, c’est le pompon : le club hippique nous a demandés pour le gala de fin d’année de fabriquer des oreil­les de dalmatien à fixer sur la bombe. Pour tout simplifier, il a fallu que j’en fabrique des amovibles parce que ma fille ne voulait en aucun cas galoper avec ces oreil­les avant l’entraînement précédant le spectacle. »

Gilbert, 43 ans, deux enfants de 12 et 7 ans :

« Ça a été terrible la fois où, pour le spectacle de cirque de fin d’année de notre fils, il a fallu lui fabriquer un déguisement entièrement à pois. Je dis ça, mais c’est ma femme qui a tout fait. Avec plein de gommettes. »

Libération du 25 juin 2007

mis en ligne le mardi 26 juin 2007
par ML



  
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