Le tabou de la carte scolaire

Le tabou de la carte scolaire

mercredi 14 mars 2007

Faut-il réformer la carte scolaire, se contenter de l’assouplir ou envisager de la supprimer ? La question a servi de détonateur aux débats sur l’avenir de l’école dans la campagne pour l’élection présidentielle. Avec, en arrière-plan, les enjeux essentiels que sont, pour l’école, l’égalité des chances et la mixité sociale.

Les premières déclarations sur le sujet sont venues du candidat de l’UMP, Nicolas Sarkozy. Dès mars 2006, ce dernier propose de "supprimer la carte scolaire" et met en avant l’idée du "libre choix" de l’établissement par les familles. Une fois lancé, le débat ne s’arrête plus. A la rentrée de septembre, le ministre de l’éducation, Gilles de Robien, parle d’"assouplir" la carte scolaire. D’accord sur l’idée, Jacques Chirac déclare, le 18 septembre, que la carte scolaire est "le garant de la mixité sociale".

Le gouvernement charge alors M. de Robien d’entamer une concertation sur le sujet. "Autrefois outil de la mixité, la carte scolaire est devenue l’instrument de la ségrégation", rétorque M. Sarkozy avant de préconiser "un choix entre trois établissements", accompagné, "afin de garantir une qualité éducative pour tous", d’une aide aux élèves en difficulté.

A gauche, Ségolène Royal lance le débat avant même d’être investie par son parti. Lors des primaires qui l’opposent à Dominique Strauss-Kahn et Laurent Fabius, elle fait entendre un point de vue très personnel sur un sujet quasi tabou au PS. Sa position est assez proche, au moins en apparence, de celle de M. Sarkozy. La carte scolaire "fige et cristallise les inégalités", déclare alors la candidate à l’investiture du PS qui prône un "assouplissement" et le choix entre plusieurs établissements. "Là, on verra quels sont les établissements qui sont délaissés", ajoute-t-elle en envisageant que l’on "donne plus" à ces établissements, dans une perspective de "reconquête de l’égalité scolaire".

Cinq mois plus tard, au lendemain de son discours de Villepinte le 11 février, c’est avec des enseignants de Seine-Saint-Denis que Mme Royal choisira d’aller débattre de son "pacte présidentiel". La réforme de la carte scolaire, qui inquiète les enseignants, est une fois encore au menu. "Assouplir la carte scolaire permettra de desserrer les contraintes et d’attribuer des moyens supplémentaires, rassure la candidate socialiste qui promet de s’octroyer, si elle est élue, "un an de réflexion" sur la question.

Il n’y a guère que le candidat de l’UDF pour défendre le statu quo. C’est même, selon lui, "une faute républicaine" que de vouloir supprimer la sectorisation. François Bayrou estime, en janvier 2007, que la carte scolaire est loin d’être "périmée, comme le croient conjointement Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal", mais il insiste sur la nécessité de garantir, sur tout le territoire, "l’égalité de traitement des enfants".

Ces dernières années, la réflexion sur les phénomènes de ségrégation scolaire et urbaine semblait passée au second plan. L’opinion paraissait presque résignée à la coexistence d’établissements aux recrutements socialement très différenciés et homogènes et aux performances très inégales. Depuis le début de la campagne, le débat très politique sur la carte scolaire et le "libre choix de l’école" a débouché sur d’autres questions : la mixité sociale dans les établissements, l’égalité de traitement sur le territoire, enfin, "l’obligation de résultats" contre l’échec scolaire - une formule commune aux trois principaux candidats. Ségolène Royal a été la première à proposer la mise en place d’un "soutien scolaire gratuit" assuré, dans les établissements, par des enseignants. Ces deux principaux concurrents ont immédiatement rallié cette idée.

Les propositions sur l’école des différents candidats se différencient assez peu. Même lyrisme dans l’affirmation des objectifs. Même flou sur les conditions de mise en oeuvre. "On va s’obséder de cette idée qu’il n’y aura plus de collège de seconde zone, plus de ghettos", déclare le 2 mars M. Bayrou dans un entretien au Monde. Et sur le sauvetage des élèves en difficulté, le candidat de l’UDF lance : "Et peu importe le prix que cela coûte !"

Mme Royal place l’éducation "au coeur de tout et en avant de tout", le candidat centriste lui donne "la priorité absolue". Les deux candidats s’engagent à "rétablir", dès la rentrée 2007, les postes d’enseignants supprimés et à "garantir les moyens" sur cinq ans. "On ne touchera pas aux moyens de l’éducation nationale", insiste M. Bayrou, celui des trois principaux candidats qui se targue de présenter le programme présidentiel le moins coûteux. Toutefois, sur la question des moyens, M. Sarkozy se distingue nettement de ses deux concurrents. Le candidat de l’UMP promet, certes, aux maîtres de "rétablir leur autorité" et de défendre leur pouvoir d’achat. Mais il continue d’affirmer son intention "de ne pas remplacer un fonctionnaire sur deux partant en retraite".


Le Monde du 15 mars 2007

mis en ligne le jeudi 15 mars 2007
par ML



  
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