Carte scolaire suites ...

La carte scolaire est devenue l’instrument de la ségrégation sociale, par Nicolas Sarkozy

Le président de l’UMP brosse le bilan de cet outil créé en 1963 et demande sa suppression. Il propose d’accorder leur autonomie aux établissements scolaires, de créer un organisme chargé de les évaluer et de faire aider davantage par l’Etat les écoles en difficulté.

En février 2006, lors de la convention éducation de l’UMP, j’ai soulevé, parmi d’autres questions, celle de la carte scolaire. Plus de quarante ans après sa mise en place, il n’est quand même pas incongru d’en dresser le bilan. Je suis heureux que cette question taboue soit devenue, en quelques mois, un sujet de débat politique, une préoccupation gouvernementale et même, semble-t-il, un thème de la campagne interne des socialistes. Afin d’éviter qu’on ne déforme ma pensée, je souhaite rappeler ici dans le détail les propositions que j’ai formulées.

La carte scolaire a été créée en 1963. Elle part du principe que la meilleure manière de garantir l’égalité des chances est d’uniformiser les établissements et d’y répartir les élèves de manière autoritaire afin de créer de la mixité sociale.

La première idée ne correspond plus aux besoins de l’école aujourd’hui. L’école accueille des publics plus nombreux, plus divers, qu’elle mène à des niveaux de qualification plus élevés. Elle ne peut plus le faire dans les mêmes conditions qu’à l’époque où une sélection sévère, parfois brutale, se chargeait d’écarter ceux qui semblaient inadaptés. Chaque enfant est différent. Les uns excellent en langues, les autres en sport, certains travaillent seuls, d’autres ont besoin d’être encadrés. Combien de parents, dans tous les milieux sociaux, ont eu parfois ce sentiment que l’école, parce qu’elle est trop monolithique, ne savait pas comprendre l’intelligence de leur enfant ? La seconde idée est juste et elle n’a pas pris une ride. Toutes les études sérieuses le démontrent : les principaux facteurs de réussite des élèves sont, dans l’ordre, la qualité pédagogique des enseignants et la mixité sociale, loin devant le nombre d’élèves par classe. Mais la carte scolaire, qui était effectivement autrefois l’outil de la mixité, est devenue l’instrument de la ségrégation.

L’incapacité des pouvoirs publics à moduler réellement les moyens des établissements en fonction des difficultés rencontrées par les élèves a progressivement creusé des différences profondes entre les établissements.

Différence de niveau, qui peut varier de 30% à composition sociologique comparable. Différence d’ambition, puisque 50% des lycées n’envoient jamais aucun dossier d’élève pour l’inscription en classe préparatoire.

Différence d’horizon, puisque les établissements situés dans les quartiers les plus défavorisés sont devenus de véritables ghettos où le seul effet de la carte scolaire est d’y concentrer les élèves le plus en difficulté quand il faudrait au contraire les répartir dans d’autres établissements.

Ces constats ne sont pas le fruit de mon imagination, mais ont été dressés par des expertises unanimement saluées. Face à cette situation, certaines familles peuvent s’émanciper de la carte scolaire en faisant le choix du privé, en s’installant dans des quartiers huppés, ou tout simplement en contournant la carte par la mobilisation de leur réseau relationnel. 30% des enfants sont ainsi scolarisés en dehors de leur collège de rattachement. Les autres sont tenus de se plier à une règle qui vaut pour les uns, mais pas pour tout le monde.

Cette réalité est choquante. Elle est contraire aux principes les plus essentiels de l’école républicaine, laïque, gratuite et égalitaire. La carte scolaire se voulait un instrument de justice. Elle est devenue le symbole d’une société qui ne parvient plus à réduire ses injustices parce qu’elle n’ose pas s’interroger sur ses outils. Devant ce constat, je formule trois propositions.

La première est de donner de l’autonomie aux établissements scolaires pour leur permettre de mettre en œuvre des projets éducatifs spécifiques. Cette méthode a fait ses preuves. Les établissements qui ont les meilleurs résultats pour tous leurs élèves sont ceux qui ont su créer une dynamique de réussite grâce à un projet spécifique. C’est en mettant de la diversité dans les méthodes, sans renoncer bien sûr au caractère national des programmes et des évaluations, que l’on permettra à chaque enfant de trouver une solution lui permettant de grandir et de s’épanouir.

Qui dit autonomie dit évaluation. Je propose que nous nous dotions d’un organisme d’évaluation de chaque établissement scolaire. Il doit s’agir d’évaluations détaillées, allant bien au-delà de la seule mesure des résultats des élèves, et s’intéressant également à la qualité du projet éducatif, à sa capacité à faire progresser tous les élèves, à l’ambiance au sein de l’établissement, etc. Ces évaluations aideront les établissements à remédier à leurs insuffisances. Elles seront évidemment à la disposition des parents.

Enfin, qui dit évaluation dit engagement de l’Etat à aider les établissements qui ont des difficultés à améliorer leurs performances. Le but n’est pas de désigner à la vindicte les établissements ayant des résultats insuffisants, mais de garantir une qualité éducative pour tous.

La conséquence logique de ces propositions, c’est le libre choix par les parents de l’établissement scolaire de leur enfant. A partir du moment où chaque établissement propose un projet spécifique, il est normal que les parents puissent choisir l’établissement qui correspond le mieux à leur enfant. Cette réforme ne peut pas intervenir du jour au lendemain. Certaines conditions doivent être préalablement remplies. Elle suppose de profondes transformations de notre système scolaire. Mais c’est le projet vers lequel je propose de tendre.

Certains demandent : "Si l’on supprime la carte scolaire, par quoi la remplacera-t-on ?". Je leur réponds : "Mais par rien ! Ou par un système d’inscription dans, par exemple, trois établissements au choix." La carte scolaire a été supprimée dans presque tous les pays de l’Union européenne. Dans tous ces pays, aucun élève n’est scolarisé dans un établissement que sa famille n’a pas choisi parce que les établissements sont à la fois divers dans la méthode, mais égaux dans la qualité. Il n’y a pas de sélection selon le niveau scolaire ou l’appartenance sociale, mais une répartition finalement assez naturelle des élèves selon le projet d’établissement qui leur convient le mieux.

Supprimer la carte scolaire est pour moi un aboutissement, pas un préalable. Mon projet n’est pas plus de liberté pour les uns, moins de liberté pour les autres. Cela, c’est le système existant. C’est au contraire la qualité éducative pour tous, un objectif difficilement contestable. La carte scolaire n’aura alors plus de raison d’être puisque tous les établissements seront de qualité. Ceux qui pensent que ça ne peut pas marcher sont tout simplement ceux qui n’ont pas confiance dans la capacité du corps enseignant et de l’école républicaine d’y parvenir. Pour ma part, je sais que le système éducatif et les enseignants ont toujours été les moteurs d’une société plus juste et je veux leur donner les moyens de le redevenir.

Le Monde 16/09/2006 Nicolas Sarkozy est président de l’Union pour un mouvement populaire (UMP)


Jospin : abroger la carte scolaire créerait un "phénomène d’inégalité"

Lionel Jospin a affirmé dimanche qu’abroger la sectorisation scolaire provoquerait "un formidable phénomène d’inégalité dans notre pays".

Lors du Grand jury RTL-Le Figaro-LCI, Lionel Jospin, qui fut ministre de l’Education nationale, a estimé qu’"un assouplissement" de la carte scolaire, défendue notamment par la socialiste Ségolène Royal, relevait d’un ministre de l’Education, voire des recteurs, mais pas d’un président de la République.

"Un candidat à l’élection présidentielle peut se poser des questions de principe. Et pour moi, la carte scolaire est une question de principe", a-t-il dit, rappelant que Nicolas Sarkozy "propose clairement" son abrogation.

La carte scolaire, a souligné l’ancien Premier ministre, est "l’application au secteur de l’Education nationale du principe de l’égalité devant le service public".

Par cette "contrainte", "l’Etat se fixe comme obligation d’assurer dans chaque école, chaque collège, chaque lycée des conditions égales d’enseignement", a-t-il expliqué.

"Cette réalité idéale n’est pas réalisée (...) Simplement, en quoi le fait qu’une égalité ne soit pas parfaite doit-il nous conduire à professer désormais l’inégalité ?", s’est-il interrogé.

Selon Lionel Jospin, la suppression de la carte scolaire serait "un formidable phénomène d’inégalité qui se répandrait dans notre pays".


Chirac : "ni réaliste ni juste de supprimer" la carte scolaire

Jacques Chirac a affirmé qu’"il ne serait ni réaliste ni juste de supprimer" la carte scolaire, mais a ajouté qu’il faut en "assouplir les règles".

"La carte scolaire, c’est la garantie de la mixité sociale", a affirmé le président de la République.

"C’est vrai qu’il y a des contournements, des rigidités qui sont engendrées par la carte scolaire" mais "faut-il la supprimer ? Ma réponse est qu’il ne serait ni réaliste ni juste de la supprimer", a-t-il ajouté.

Selon M. Chirac "en revanche, deux voies doivent être engagées et qui le sont d’ailleurs : la première, c’est l’amélioration du niveau des établissements en difficulté".

"C’est ce que fait le ministre (de l’Education nationale), M. (Gilles) de Robien, avec ses 249 collèges +ambition réussite+ qui sont une réponse au rééquilibrage", a-t-il ajouté.

"Deuxièmement, il faut probablement assouplir les règles (de la carte scolaire) en accord avec les organisations représentatives des enseignants, et c’est ce que fait également M. de Robien", a-t-il poursuivi.

mis en ligne le lundi 18 septembre 2006
par ML



  
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